Le plain packaging a fait baisser la consommation de cigarettes
Suppression des logos sur les paquets de cigarettes en Australie : bonne nouvelle pour les marques fortes ! Associée au prix d’un produit de luxe, la décision des pouvoirs publics se traduit par une baisse continue de la consommation de tabac.
Examinons du point de vue des marques, et non pas de la santé publique, les conséquences de cette première saluée comme “historique” par l’OMS.
A court terme, le packaging neutre profitera aux marques fortes qui ont construit un top of mind durable. Marlboro, Philip Morris, Dunhill, mais aussi des marques nationales consommées localement resteront les noms les plus cités. Les marques seront réduites à leur plus simple appareil : leur nom. Ce qui permettra de constater que certains noms sont plus efficaces et plus attractifs que d’autres. Les marques au nom pas très glamour devraient d’ores et déjà anticiper en changeant de nom : vu la tendance généralisée du risque zéro, elles doivent imaginer un scénario catastrophe et en tirer les conséquences avant qu’il ne soit trop tard.
A plus long terme, les marques perdront de leur force. Situation similaire à celle des marques devenues des génériques sur leur marché : pour beaucoup de consommateurs, Sopalin, Kleenex, Zodiac, Jacuzzi etc. sont des noms communs et non plus des noms de marque. Les marques de cigarettes, privées de leurs attributs visuels, connaîtront la même banalisation et une forme de “neutralisation”. Si le logo et les signes visuels disparaissent, cela peut signifier la disparition pure et simple de certaines marques. Frigidaire a disparu, même si son nom demeure notoire… Il y a fort à parier qu’on s’achemine vers une concentration des marques et une suppression des marques trop faibles.
Comment éviter cette situation de tous les dangers ? En devenant réellement une marque !
Une marque devient une vraie marque lorsqu’elle signe des produits qui n’appartiennent pas à la catégorie d’origine. La Laitière, aujourd’hui, signe des sorbets à l’eau (rayon surgelé), malgré son nom évoquant les laitages et malgré sa catégorie d’origine (yaourts, puis desserts au rayon frais). Une marque forte se construit en effet sur une “idée” qui va au-delà du produit, ce qui permet à la marque de changer de catégorie produits et d’opérer un streching. De ce point de vue, certaines marques de cigarettes sont plus marques que d’autres. Marlboro, grâce à sa diversification réussie dans la mode avec Marlboro Classics, pourra donc continuer de faire vivre sa promesse du cow boy, des grands espaces et d’une nature brute. Ce sera plus difficile pour Craven ou Karelia qui sont de pures marques-produits sans “idée” réellement forte.
Une conclusion s’impose : que les marques de cigarettes fasse leur métier malgré cette contrainte supplémentaire ! Il est temps qu’elles différencient vraiment les cigarettes entre elles (innovation de couleurs, formes, toucher, odeur), qu’elles se diversifient vers d’autres produits où elles pourront exprimer leur “idée” forte (pourquoi pas des confiseries, des produits d’hygiène buccale, des accessoires de mode comme les lunettes de soleil, la bagagerie, la maroquinerie etc.), et qu’elles développent des services attendus par les fumeurs (abonnement, livraison, etc.). Ou qu’elles inventent tout simplement la cigarette No-no (non nocive non électronique) ! Souvenons-nous que d’autres marques ont déjà réussi à surmonter le danger de la banalisation. C’est le cas de Total qui, il y a 20 ans, a misé avec succès sur le service en réinventant la station-service (toilettes propres, mini-market, cartes pré-payées, offres B2B etc.), alors qu’un litre de carburant est identique partout. En définitive, la décision australienne qui ne manquera pas d’inspirer d’autres pays est une bonne nouvelle pour les marques fortes.