Bad Buzz Bagelstein

La nouvelle campagne publicitaire de l’enseigne de bagels s’inspire directement de l’affaire Baupin… «Il est chaud votre trou?»: La pub de Bagelstein inspirée de l’affaire Baupin fait polémique.

 

Qu’est-ce qui vous ferait plaisir pour accompagner votre sandwich, une pincée de Macron, un zeste de Leonarda ou, plus saignant, une bonne tranche de Baupin ? Coutumière des campagnes de pub pas très fines, Bagelstein, la marque de sandwichs ronds vient encore de frapper, et signe une publicité d’un goût douteux qui surfe sur l’affaire Denis Baupin, accusé par plusieurs femmes de harcèlement et d’agressions sexuelles. L’affiche, photographiée à Nantes et relayée sur les réseaux sociaux ce vendredi, met en scène un échange de SMS fictifs avec l’ex-numéro deux de l’Assemblée nationale, qui commence par un très distingué : « Il est chaud votre trou ? ». De quoi faire bondir les internautes, qui dénoncent le sexisme et la grossièreté de l’enseigne.

 

« Si on parle de sexe, on nous taxe d’être sexistes »

« Je ne comprends pas pourquoi ça choque, s’étonne Gilles Abecassis, cofondateur de l’enseigne Bagelstein, contacté par 20 Minutes. Moi, je suis plutôt choqué par les SMS que Denis Baupin a envoyés. Et je suis sûr que s’il voit cette pub il sera mort de rire ».

A aucun moment l’enseigne n’a imaginé que cette affiche puisse affecter une partie du public, à commencer par les treize femmes qui ont témoigné contre Denis Baupin. « Nous, on veut simplement faire des blagues, on est plus dans la vanne, se justifie Gilles Abecassis. On ne peut plus rien dire, c’est dingue ! Si on parle de sexe, on nous taxe d’être sexistes alors que c’est tout le contraire. Notre démarche est citoyenne et solidaire, poursuit, convaincu, le cofondateur de la marque. Qui parlera encore de l’affaire Baupin dans un an, quand il aura retrouvé un poste grassement payé dans une grande entreprise ? »

Le sexe, un moyen comme un autre d’attirer l’attention ? « L’objectif pour Bagelstein, c’est de gagner en notoriété et augmenter le trafic dans leurs magasins, ça fait partie du job, explique Pierre-Louis Desprez, directeur général de Kaos Consulting, cabinet spécialisé en innovation et en marques. Aujourd’hui, les enseignes du même type sont sur le créneau qualité-goût-service. Pour se démarquer, Bagelstein va sur le terrain du sexe, du scandaleux. C’est une recette usée jusqu’à la corde mais qui fonctionne : les gens parlent d’eux et par ce biais, certains vont découvrir la marque et se rendre dans l’une des enseignes », poursuit l’expert.

« Attention au retour de bâton »

Sur les réseaux sociaux, la stratégie de communication de Bagelstein ne fait pourtant pas rire tout le monde.

D’autant que l’enseigne n’en est pas à son coup d’essai. En 2013 déjà, Bagelstein avait lancé une campagne se moquant de Leonarda, la lycéenne rom expulsée avec sa famille vers le Kosovo. Et la semaine dernière, en marge de la manifestation contre la loi Travail, une altercation éclatait dans une enseigne rennaise. Quatre jeunes, qui accusaient Bagelstein de sexisme et d’homophobie, ont agressé le gérant d’une boutique avant d’être condamnés à une peine de prison ferme.

« On s’est aussi moqué de Zlatan, de Sarkozy, de Bernard Tapie et aussi de Christine Boutin parce qu’elle est mariée avec son cousin, précise Gilles Abecassis. Notre idée, c’est de faire sourire ». Sauf qu’à terme, cette stratégie pourrait se retourner contre l’enseigne. « Une marque repose sur un trépied : la notoriété, l’image et la satisfaction du client, décrypte Pierre-Louis Desprez. La signature de Bagelstein, c’est : “Arrêtez de manger de la merde“. Ce qui laisse supposer que leurs produits sont de qualité. Mais attention au retour de bâton : quand on mise sur le scandale pour accroître sa notoriété, si la qualité ne suit pas et que le client n’est pas satisfait du produit, il ne revient pas ».

Interview publié par 20 Minutes, 3 juin 2016.BAD BUZZ.